Le contrat de travail est un moment fondamental de la vie d’un travailleur. La logique juridique du contrat a été définie par le code civil créé en 1804 sous l’autorité de Napoléon Bonaparte. C’est pourquoi nous évoquerons d’abord la nature juridique du contrat de travail, contrat parmi les contrats, tel que défini par le code civil.

Les différentes ruptures du contrat de travail à l’initiative du salarié doivent être maîtrisées pour que vous puissiez aider les salariés dans les différentes situations qu’ils vivent au cours de leur carrière professionnelle.
   

 
1. Nature juridique du contrat de travail

 
Le contrat de travail dans le Droit français est un contrat :

  • Tel que défini par le code civil, article 1101 : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes, destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »
      
  • Sous liberté surveillée : code civil article 1102 : « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public. »

Ce qui « d’ordre public » est ce qui ne peut pas être modifié par les deux parties au contrat (l’employeur et le salarié).

Exemple, imaginons qu’un salarié soit d’accord pour signer un contrat de travail prévoyant qu’il travaille 70 heures par semaine. Ce contrat est contraire à « l’ordre public » (loi ne pouvant pas être l’objet d’une modification) qui indique qu’un travailleur ne peut pas dépasser 48 heures par semaine, 42 heures sur douze semaines consécutives et 60 heures pour des tâches d’une urgence exceptionnelle et avec l’accord de l’inspection du travail. Un tel contrat n’aurait donc pas d’existence juridique. Il serait nul en droit.

  • Qui a la même force qu’une loi dès lors qu’il respecte les lois existantes. Il est donc opposable en justice. Code civil article 1103 : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »
     
  • À titre onéreux : Code civil, article 1107 : « Le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l'autre un avantage en contrepartie de celui qu'elle procure. » C’est la nature même du contrat de travail : le salarié fournit son travail en contrepartie d’une rémunération.


2. Licenciement pour motif personnel : cause réelle et sérieuse

 

Avant d’en arriver à un licenciement, un employeur dispose de diverses sanctions possibles (avertissement, blâme, mise à pied, etc.). Ces sanctions doivent être définies dans le règlement intérieur de l’entreprise.

Rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur - SolutionsCSE Le Mag

Le code du travail met des limites dans le temps pour ces sanctions :

Article L1332-4

« Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. »

Article L1332-5

« Aucune sanction, antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires, ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction. »

Le code du travail met des limites dans le temps pour ces sanctions :

Article L1332-4

« Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. »


Article L1332-5

« Aucune sanction, antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires, ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction. »

Venons-en au licenciement.

Il ne peut y avoir de licenciement s’il n’est pas justifié par une cause réelle et sérieuse.Si un salarié n’a pas à justifier sa démission (voir l’article Rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié) l’employeur a l’obligation de fournir un motif pour déclencher un licenciement.

Le motif invoqué par l’employeur doit être :

  • Vérifiable matériellement,
  • Objectif et donc ne pas résulter d’un mouvement d’humeur,
  • Suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat, sans pour autant être une « faute grave » (voir plus loin le licenciement pour faute grave).

 
Ainsi les motifs suivants ont pu être jugés comme cause réelle et sérieuse :

  • Refus d’exécution d’une mission professionnelle,
  • Refus de suivre une formation professionnelle dans le cadre du travail et rémunérée comme telle,
  • Abandon de poste,
  • Absences répétées ou retards répétés,
  • Violence à l’égard d’autres salariés,
  • Attitude contraire aux bonnes mœurs,
  • Une mésentente avec d’autres salariés qui perturbe l’activité de l’entreprise,
  • Injures, propos racistes,
  • État d’ébriété,
  • Porter une tenue vestimentaire contraire à la tâche à accomplir et au but recherché,
  • Indiscipline,
  • Manque de loyauté,
  • Critique publique de la Société,
  • Faute professionnelle,
  • Insuffisance professionnelle (attention à la formation d’adaptation qui est désormais obligatoire),
  • Insuffisance de résultats. La non-réalisation des objectifs fixés au contrat ne suffit pas à justifier le licenciement. Les juges appréciant si les objectifs étaient réalistes. Il faut donc une faute ou une négligence du salarié ou bien une insuffisance professionnelle vis-à-vis d’objectifs réalistes,
  • Perte de confiance qui s’appuie sur des faits objectifs imputables au salarié,
  • Nécessité de remplacement du salarié absent pour maladie (absences répétées et prolongées perturbant le fonctionnement du service ou la bonne marche de l’entreprise),
  • Inaptitude déclarée par le médecin du travail (y compris après un accident du travail), après recherche de reclassement dans l’entreprise et impossibilité ou refus par le salarié du reclassement dans le délai d’un mois.

 

Les motifs suivants ne constituent pas des motifs de licenciement :

  • Le comportement du conjoint, même s’il fait concurrence à l’entreprise, sauf si un comportement déloyal est démontré,
  • La vie personnelle du salarié,
  • Subir un harcèlement moral ou sexuel ou témoigner de tels agissements, le licenciement est nul,
  • Discrimination (origine, sexe, ethnie, orientation sexuelle, âge, situation de famille, opinion politique, syndicale, convictions religieuses, patronyme, apparence physique, état de santé quand il ne perturbe pas le bon fonctionnement de l’entreprise, etc.), le licenciement est nul,
  • Pendant un arrêt de travail faisant suite à un accident du travail ou déclenché par une maladie professionnelle (le licenciement est nul), sauf si l’employeur peut justifier de l’impossibilité de maintenir le contrat, par exemple causée par l’interruption totale de l’activité, une faute grave ou lourde du salarié.
     

Conséquences de l’absence de faute réelle et sérieuse :

Si le salarié conteste le caractère réel et/ou sérieux de son licenciement, il peut se tourner vers le conseil prud’homal.

Si les tribunaux donnent raison au salarié sur l’absence de cause réelle et sérieuse, voyons ce que dit le code du travail :

Article L1235-3 : « Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés (télécharger le tableau).

Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9 [indemnité légale].

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Cette indemnité est cumulable, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles L. 1235-12 [absence de consultation du CSE, lorsqu’elle est obligatoire], L. 1235-13 [non-respect de la priorité de réembauchage] et L. 1235-15 [absence d’élection d’un CSE], dans la limite des montants maximaux prévus au présent article. »

Ce tableau a été très controversé à sa mise en place à la suite des ordonnances de septembre 2017. De nombreux juges ont considéré qu’on retirait leur pouvoir d’appréciation des conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ils considéraient, par exemple, qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un senior de 58 ans n’avait les mêmes conséquences sur la difficulté de retrouver ensuite un emploi que pour un salarié de 40 ans.


3. Licenciement pour motif personnel : faute grave

 
Les causes d’une faute grave sont telles qu’elles empêchent le maintien du salarié pendant le préavis. En général le salarié accusé d’une faute grave est mis à pied de manière conservatoire en attendant sa convocation à l’entretien préalable à licenciement.

La faute grave prive le salarié du préavis et de l’indemnité de licenciement.


4. Licenciement pour motif personnel : faute lourde

 
La faute lourde autorise le licenciement immédiat, sans indemnité de préavis et sans aucune indemnité de licenciement.

La faute lourde est caractérisée par la volonté de nuire à l’employeur. Il ne suffit pas de prouver qu’il y a préjudice, il faut aussi prouver l’intention de nuire. C’est donc une faute rarement retenue par les tribunaux.

Ainsi un vol ne suffit pas à caractériser la faute lourde, il reste à démontrer que ce vol était organisé pour nuire à l’employeur.

Celui qui a détourné la clientèle vers un concurrent a justifié d’une faute lourde.


5. Licenciement économique individuel

 
Un licenciement économique peut être individuel et ne pas concerner plusieurs salariés à la fois.

Un tel licenciement n’est pas causé par le salarié concerné (on ne lui reproche pas une faute) mais par la situation économique de l’entreprise.


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Il y a deux situations qui peuvent entrainer un licenciement pour motif économique d’un salarié :

  • La suppression de son poste compte tenu de difficultés économiques ou de l’évolution technologique,
  • Le refus par le salarié d’une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail causée par des difficultés économiques ou l’évolution technologique.

Dans ce deuxième cas, l’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable au cours duquel il présente cette modification substantielle du contrat de travail.

Le salarié a un mois pour réfléchir à sa réponse. À l’issue de ce mois de réflexion :

  • Soit, il accepte la modification,
  • Soit, il refuse et l’employeur peut le licencier pour motif économique.


6. Procédure d’un licenciement pour motif personnel

 
Quand l’employeur envisage un licenciement, il doit, au préalable :

  • Convoquer le salarié qu’il considère comme fautif à un entretien préalable.
  • Le courrier de convocation doit préciser qu’il s’agit d’un entretien préalable à licenciement.
  • Le courrier doit indiquer que le salarié convoqué peut être accompagné d’une personne salariée de l’entreprise ou d’un membre du CSE. S’il n’existe pas de CSE, le salarié peut être accompagné d’un conseiller du salarié. Le courrier doit indiquer les adresses proches de l’entreprise où le salarié convoqué peut trouver la liste départementale des conseillers du salarié agréés par le Préfet. Ces conseillers sont agréés à condition d’avoir une bonne expérience du monde de l'entreprise, des relations sociales et d'une réelle connaissance du droit social.
  • Cette convocation est un courrier avec accusé de réception. Attention, si vous refusez cette lettre ou encore si vous ne voulez pas aller la chercher à la poste, les délais légaux commencent à la présentation ou à la mise dans votre boite aux lettres d’un bulletin d’accusé réception.
  • A défaut d’envoyer un tel courrier, la lettre peut être remise en mains propres contre décharge. Vous pouvez refuser de signer la décharge, la lettre sera envoyée par la poste.
  • Dès que ce courrier a été présenté, il doit s’écouler au minimum 5 jours ouvrables avant la date de l’entretien préalable

 

Pour en savoir plus sur le déroulement de l’entretien préalable à sanction/licenciement, consultez l'article « Assister un salarié à l’entretien préalable à sanction/ licenciement ».

 
C’est par une nouvelle lettre avec accusé de réception que l’employeur annonce sa décision au salarié convoqué à l’entretien préalable.

Cette lettre ne peut pas être expédiée pendant les deux jours ouvrables qui suivent l’entretien.

 

À la date effective du licenciement, l’employeur doit fournir au salarié :

  • Son solde de tout compte (que le salarié peut dénoncer pendant les 6 mois qui suivent),
  • Le document destiné à Pôle Emploi (ou France Travail) pour permettre au salarié de s’y inscrire.


7. La rupture conventionnelle

 

Par principe, une rupture conventionnelle est le résultat d’un accord entre un salarié et son employeur sur le fait de mettre fin au contrat de travail.

Mais le plus souvent, l’un prend l’initiative de la proposer à l’autre et c’est assez souvent le salarié qui en est à l’initiative. L’intérêt d’une rupture conventionnelle pour le salarié, en comparaison avec la démission, est de percevoir l’équivalent d’une indemnité de licenciement et d’avoir droit aux allocations chômage. Une fois tombés d’accord sur cette rupture conventionnelle, l’employeur et le salarié la signent puis attendent 15 jours calendaires pendant lesquels chaque partie peut mettre un terme à l’accord sans avoir à se justifier.

 

Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, il est prolongé jusqu'au premier jour ouvrable. Une fois ce délai passé, la rupture conventionnelle est envoyée à la Direction départementale du travail qui dispose de 15 jours ouvrables pour accepter ou refuser cette rupture conventionnelle. L’absence de réponse au terme de ces 15 jours ouvrables vaut acceptation.

S’il s’agit d’une rupture conventionnelle entre un salarié protégé (notamment membre du CSE ou Délégué syndical), cette rupture doit être d’abord acceptée par l’inspecteur du travail.


8. Fiscalité des indemnités de licenciement

 
Tant que les indemnités de licenciement ou de rupture conventionnelle ne dépassent pas les plafonds légaux, ces indemnités ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu.

Au-delà de ces plafonds, les sommes versées par l’employeur sont considérées comme du salaire, soumises à charges sociales et à l’impôt sur le revenu.

licenciement 768 x 512

10. Synthèse


L’employeur peut rompre le contrat de travail à son initiative à conditions de respecter la procédure appropriée. Il ne peut donc pas chasser un salarié d’une minute à l’autre sans respecter ces règles définies par le code du travail pour rompre un contrat de travail.



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