Quels sont les trois rôles des membres du CSE, ce qui a changé en créant le CSE



Le CSE a trois rôles hérités des DP, CE et CHSCT instances disparues en 2018 et 2019 au plus tard. Quels sont ces trois rôles ? Y-a-t-il des modalités de fonctionnement différentes entre les anciennes instances et le CSE ? Eclairons ce qui a changé.

comite social et economique
Le comité Social et Economique (CSE) a hérité des IRP qui l'on précédé

En créant le CSE, les ordonnances du 22 septembre 2017 ont supprimé les anciennes Instances Représentatives du Personnel (IRP) :

  • Délégués du personnel (DP)
  • Le comité d’entreprise ou d’établissement
  • Le Comité d’Hygiène Sécurité, et Conditions de Travail (CHSCT).

La création du CSE a reconduit les mêmes fonctions de ces IRP au sein d’une seule structure. Les seules modifications portent sur des droits parfois différents et sur le fonctionnement des instances.


Nous allons définir ces trois rôles du CSE puis citer ce qui a changé entre les anciennes IRP et le CSE et pointer les contradictions éventuelles provoquées par cette « fusion » des IRP en une seule instance.

1. Les trois rôles du CSE


Rôle 1 : Votre CSE défend les salariés individuellement et collectivement (ex-dp)


Elu du CSE, vous avez pour rôle de défendre individuellement chaque salarié dès que celui-ci rencontre des difficultés avec sa hiérarchie directe ou l’employeur.

Un salarié a le droit de se défendre tout seul vis-à-vis de sa hiérarchie ou l’employeur. Il n’est pas obligé d’en référer à un membre du CSE ni de passer par lui pour présenter ses éventuelles réclamations. Elu du CSE, vous n’êtes pas, de votre côté, obligé de défendre un salarié. C’est votre rôle, mais vous pouvez refuser de le faire. Par exemple si vous êtes en désaccord, après avoir enquêté sur la réalité des fautes, avec ce qu’a fait un salarié fautif : racisme, misogynie, agression sexuelle ou sexiste, etc., vous pouvez légitimement vous poser la question d’accompagner un tel salarié à son entretien préalable à sanction.
On observe que les délégués expérimentés accompagnent le salarié de ce type à leur entretien préalable, sans le défendre mais discutent seulement de la nature de la sanction.
De même, quand un salarié est convoqué pour un entretien préalable à une sanction, voire pour un entretien préalable à un éventuel licenciement, un salarié peut, lors de cet entretien :

  • Être accompagné par un simple salarié,
  • Être accompagné par un membre du CSE,
  • N’être accompagné par personne.


Le rôle de l’accompagnateur est, légalement, d’être témoin des reproches faits au salarié. Le salarié peut exiger de son accompagnateur la rédaction d’un témoignage écrit. Ce témoignage peut servir au salarié sanctionné à vérifier si les remontrances évoquées dans la lettre de sanctions ont bien été développées au cours de l’entretien. A défaut, des griefs qui ne l’étaient pas n’auraient pas de valeur devant les tribunaux.
L’accompagnateur, d’autant plus s’il est membre du CSE, peut aussi se faire l’avocat du salarié réprimandé. Mais rien ne l’y oblige.

Pour remplir ce rôle avec efficacité, en tant que membre du CSE il est souhaitable que vous :

  • Sachiez lire et analyser une feuille de paye,
  • Connaissiez les avantages de la mutuelle d’entreprise,
  • Connaissiez les spécificités de la convention collective applicable dans l’entreprise,
  • Connaissiez les bases du droit du travail,
  • Connaissiez les obligations de l’entreprise en matière de Santé Sécurité et Conditions de Travail (SSCT),
  • Ayez suivi des formations pour ce faire.


L’une des notions les plus importantes à connaitre pour vous CSE en votre qualité de défenseur individuel des salariés est la notion d’atteinte à leurs droits individuels dans le cadre du travail.
Il est fréquent qu’un salarié vienne demander à un délégué « mon chef m’a imposé de faire ceci ou cela, est-ce qu’il a le droit » ? Ou encore « l’employeur nous impose de nous habiller comme-ci ou comme-ça, en a-t-il le droit » ?
Le code du travail fourni une définition des limites du pouvoir de l’employeur. Toute chose que l’employeur impose à un salarié doit « être justifié par la tâche à accomplir et proportionné au but recherché ».

Exemple : un informaticien travaille dans un local où aucun client de l’entreprise n’est amené à entrer, il n’a pas de rôle de représentation de l’entreprise. Pourtant l’employeur veut lui imposer de venir travailler chaque jour, habillé d’un costume. Cet été-là, l’informaticien vient en bermuda au travail. Il est licencié pour ne pas avoir respecter les ordres de son employeur. La cour de cassation confirme que ce licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Pour accomplir sa tâche d’informaticien, ce salarié n’avait pas besoin de mettre un costume. Tenter de lui imposer n’était pas proportionné au but recherché par son emploi : assurer le bon fonctionnement du réseau informatique de l’entreprise.
Bien évidemment, à contrario, un salarié qui refuserait de mettre un casque ou des chaussures de sécurité sur un chantier serait passible de sanctions. L’employeur ayant une obligation de sécurité et de santé vis-à-vis de chaque salarié travaillant sous son autorité.

En tant que délégué du personnel, vous pouvez présenter les réclamations individuelles ou collectives portant sur la bonne application du droit du travail, des conventions collectives et accords de branches, des accords d’entreprise ou des usages propres à votre entreprise. Pourtant, cette notion n’est indiquée dans le nouveau code du travail, issu des ordonnances du 22 septembre 2017, que pour les entreprises de 11 à 49 salariés.
Le code du travail indique pour ces petites entreprises que chaque membre du CSE exerce individuellement son rôle de représentant du personnel, mais pas pour les entreprises de 50 salariés et plus. Le CSE des entreprises de 50 salariés et plus est considéré de fait comme une structure à décision collective.

 

 

Ce qui a changé pour les CSE d'entreprises de 50 salariés et plus entre DP et CSE


Les réunions de délégués du personnel se tenaient mensuellement. Un CSE de moins de 300 salariés peut n’être convoqué qu’une fois tous les deux mois.

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Ce qui est devenu contradictoire pour les CSE d’entreprises de 50 salariés et plus entre DP et CSE :

  • Les réunions de délégués du personnel étaient précédées par une liste de réclamations individuelles ou collectives dans toutes les entreprises de 11 salariés et plus qui devaient être transmises à l’employeur par écrit 2 jours ouvrables avant la réunion, l’employeur y répondait par écrit au plus tard dans les huit jours, il n’y avait pas de procès-verbal de la réunion de DP. Cela n’est valable désormais que dans les entreprises de 11 à 49 salariés.

  • Les réunions de CSE dans les entreprises de 50 salariés et plus ont un ordre du jour arrêté par le secrétaire et l’employeur, pas de liste de réclamations individuelles ou collectives. De nombreuses entreprises ont décidé du traitement de ces questions par un accord signé avec les syndicats de l’entreprise.

Rôle 2 : Le CSE est informé / consulté et gère les ASC (ex-CE)


Le CSE est informé et consulté avant toute décision de l’employeur sur la marche de l’entreprise. Il gère de droit les ASC existant dans l’entreprise. Les CE ont été créés par une ordonnance du gouvernement provisoire présidé par le Général De Gaulle signée le 22 février 1945. Cette ordonnance ne prévoyait qu’une information du CE sur la marche de l’entreprise. C’est la loi du 16 mai 1946 qui imposa que le CE soit informé et consulté avant que la décision ne soit prise. Depuis cette date, cette obligation n’a jamais été remise en cause par le législateur. La loi Rebsamen du 15 août 2015 avait réorganisé le déroulement des consultations récurrentes en les regroupant en trois items :

  • Les orientations stratégiques de l’entreprise,
  • La situation économique et financière de l’entreprise,
  • La politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

Les ordonnances du 22 septembre 2017 ont confirmé ces modalités pour le CSE.

L’information du CSE est regroupée dans une Base de Données Economique et Sociale (BDES) qui permet à tous les élus, aux représentants syndicaux au CSE et aux délégués syndicaux de l’entreprise de consulter à tout moment les documents que l’employeur doit transmettre au fil de l’année au CSE.

La consultation se déroule selon un mode opératoire précis :

  • L’employeur informe le CSE qu’il envisage de prendre une décision sur la marche de l’entreprise, il transmet à chaque membre du CSE les documents nécessaires à la compréhension du projet,
  • Votre CSE dispose d’un mois pour analyser ce projet. Deux mois s’il désigne un expert pour l’aider dans cette analyse. Trois mois pour les entreprises ayant plusieurs CSE d’établissement et un Comité Central.
  • Au terme de ces délais votre CSE adopte en séance plénière un avis motivé sur le projet de l’employeur. Cet avis ne consiste pas à être pour ou contre, votre CSE ne disposant pas du pouvoir d’empêcher que la décision finale s’applique. Un avis motivé doit indiquer ce que votre CSE apprécie éventuellement, craint, regrette et propose d’autre dans le projet qui vous est présenté.
  • Cet avis est soumis au vote de votre CSE et consigné dans le procès-verbal de la réunion au cours de laquelle il est adopté.

Le CSE gère de droit toutes les Activités Sociales et Culturelles facultatives misent en œuvre prioritairement dans l’entreprise ou l’établissement au bénéfice des salariés, de leur famille (conjoint et enfants) et des stagiaires.
Ce droit, cette exclusivité, vient de la charte du travail instaurée par le gouvernement Pétain en octobre 1941. Sous ce gouvernement les syndicats existants (CGT, CFTC) étaient bannis ; un syndicat unique devait être mis en place par catégorie (ouvriers, employés, etc.), aucune élection professionnelle n’était organisée. L’employeur désignait les membres d’un Comité Social d’Entreprise qui se voyait confier essentiellement la gestion des œuvres sociales existant dans l’entreprise : cantines, jardins ouvriers, logements ouvriers, activités sportives, etc.

A la création des CE, prévue dans le programme de la résistance, on ne remit pas en cause cette gestion des œuvres sociales de la charte du travail de 1941. Cela fait de la France le seul pays démocratique au monde où les représentants du personnel élus gèrent de droit les œuvres sociales, intitulées Activités Sociales et Culturelles depuis les lois AUROUX d’octobre 1982.

Ce qui a changé pour les CSE d’entreprises de 50 salariés et plus entre CE et CSE :


Certaines expertises décidées par le CSE étaient, pour le CE ou le CHSCT, entièrement financées par l’employeur. Le CSE doit par contre financer 20 % pris sur son budget de fonctionnement pour deux expertises importantes : la stratégie de l’entreprise et un changement important de l’organisation du travail et des conditions de travail.

budget
Ce qui est devenu contradictoire pour les CSE d’entreprises de 50 salariés et plus entre CE et CSE :


Les réunions de CSE dans les entreprises de 50 salariés et plus ont un ordre du jour arrêté par le secrétaire et l’employeur, pas de liste de réclamations individuelles ou collectives. De nombreuses entreprises ont décidé du traitement de ces questions par un accord signé avec les syndicats de l’entreprise.

ordre du jour

Rôle 3 : Le CSE agit pour la santé, la sécurité et les conditions de travail (ex-CHSCT)


Le CSE est informé et consulté sur toutes les questions concernant la Santé, la Sécurité et les Conditions de Travail (SSCT). Le CSE procède à des visites régulières des locaux de l’entreprise ou de l’établissement et à des enquêtes sur les accidents du travail.
Les CHS (Comité d’Hygiène et Sécurité) ont été créés en 1947. Puis au sein des CE il existait une commission des conditions de travail. Les lois AUROUX d’octobre 1982 fusionnèrent ces deux instantes en un CHSCT (Comité d’Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail).

L’action sur le terrain de la SSCT est le rôle où les représentants du personnel ont le plus de pouvoir pour ce qui touche à la marche de l’entreprise. L’employeur est, effectivement, le seul responsable de la bonne santé, physique et psychique, des salariés qui travaillent sous son autorité. Il a, bien sûr, le pouvoir de sanctionner un salarié qui ne respecte pas les règles établies dans l’entreprise pour préserver la santé des salariés. Mais son obligation de résultat consiste aussi à veiller à ce que les salariés respectent les règles en question.

Votre CSE peut désigner un expert rémunéré par l’entreprise pour deux expertises SSCT :

  • En cas de risque grave identifié, financée à 100% par l’employeur,
  • En cas de modification importante des conditions de santé et sécurité ou des conditions de travail, financée à 80 % par l’employeur et 20 % par le CSE sur son budget de fonctionnement.

L’employeur doit mettre en œuvre une prévention des risques professionnels, le CSE contribue à ce que cette prévention soit efficace. L’employeur doit informer chaque salarié dès son embauche des risques professionnels existant dans l’entreprise et lui donner les instructions appropriées. Le CSE veille à ce que cela soit effectif. L’employeur doit mettre en place les moyens adaptés, afin de prévenir les risques professionnels, dans l’organisation du travail, les horaires de travail, les outils de travail utilisés et les locaux de travail. Le CSE y veille par ses enquêtes, contacts avec les salariés et visites des locaux. L’employeur doit vérifier que ce qu’il confie à un salarié correspond à sa capacité personnelle de le mettre en œuvre en fonction de ses capacités individuelles professionnelles, intellectuelles et physiques. Le CSE consigne dans les documents prévus à cet effet ce qui lui semble contraire à cette obligation.

Cette obligation de résultats impose aussi à l’employeur de mettre à jour tous ces éléments en fonction de l’évolution des techniques et du savoir scientifique pour mieux prévenir chaque jour les risques professionnels. Le CSE dispose d’un droit d’alerte en matière SSCT et chaque salarié dispose du droit de retrait en cas de risque pour sa santé.

L’intérêt de l’employeur, des salariés et des représentants du personnel est que la santé de chacun soit préservée et que venir au travail ne soit pas un danger, ni physique ni psychique. Le nombre de situation de harcèlement moral, de « burnout » ou de litiges portant sur des comportements sexistes observé dans les entreprises montre que ce sujet est d’une importance capitale dans le rôle du CSE.

Ce qui a changé pour tous les CSE entre DP (11 à 49 salariés), CHSCT (50 salariés et plus) et CSE

 

L’employeur doit financer la formation de tous les membres des CSE, y compris ceux de moins de 50 salariés, sur les questions SSCT. Hier seuls les membres du CHSCT disposaient de cette formation payée par l’employeur, désormais ce sont tous les membres des CSE qui y ont droit, suppléants compris (le CHSCT n’avait pas de suppléants). C’est comme si, hier, les élus DP et CE avaient bénéficié dans les mêmes conditions de financement de la formation des membres du CHSCT

 

formation
Ce qui a changé pour les CSE d’entreprises de 50 salariés et plus entre CHSCT et CSE :

  • Le CHSCT pouvait désigner un expert spécialisé rémunéré par l’employeur pour deux expertises : risque grave et changement important des conditions de travail. Le CSE doit participer à hauteur de 20 % en cas d’expertise sur les conditions de travail.
  • Le CSE peut financer des expertises SSCT, que l’employeur n’aurait pas à financer, grâce à son budget de fonctionnement. Le CHSCT n’avait pas de budget propre.
conditions de travail
3 roles CSE

2. Synthèse


Le transfert des trois anciennes IRP dans le CSE, qui les a remplacées au plus tard le 1ier janvier 2020, n’est pas tout à fait un copié-collé. Il y a moins d’élus au total pour trois missions au lieu d’une ou deux. Il était fréquent que les élus de CE soient à la fois DP, mais des élus aux trois missions c’était plus rare. L’élu de CSE est à la fois défenseur des salariés, consulté sur la marche de l’entreprise, gestionnaire des ASC et promoteur de la prévention des risques professionnels.