La Loi dite « TOURAINE » était en place depuis le 1ier janvier 2014. Elle a été remplacée par la loi « BORNE » qui est en place depuis le 1ier septembre 2023.
Le présent article synthétise ce qu’était la loi « TOURAINE ».

Cet article synthétise la loi « TOURAINE » appliquée du 1ier janvier 2014 au 31 août 2023. Il reste rédigé tel qu'il était applicable du 1er janvier au 31 août 2023.


1. Régime de retraite par répartition


La retraite par répartition consiste à ce que les actifs et leurs employeurs alimentent les caisses de retraite par leurs cotisations. Le fruit de ces cotisations permet de verser les pensions des retraités. En France ces caisses de retraite sont sous le contrôle des partenaires sociaux, du parlement et de l’état.

L’autre système collectif existant dans d’autres pays est la retraite par capitalisation. Chaque actif, via son employeur qui abonde, cotise dans un fonds de retraite. Ce capital est rendu à la retraite sous forme de rente à vie.

La retraite par répartition est aussi une rente à vie, mais elle est augmentée sans régularité et sans suivre complètement l’inflation. La retraite par capitalisation peut ne pas être augmentée.

2. La logique des trimestres


Pour comprendre comment fonctionne le principe des trimestres, prenons un exemple. Vous êtes né en 1960, vous deviez avoir travaillé 167 trimestres pour partir à « taux plein » à 62 ans en 2022. Taux plein = sans subir de décote sur le montant de votre pension CNAV.

Un trimestre, c’est trois mois en termes de temps, mais en réalité c’est d’abord de l’argent.

Du 1ier février 1972 jusqu’au 31 décembre 2013, un trimestre équivalait à cotiser sur un montant de salaire équivalent à 200 fois le SMIC horaire du moment.

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Exemple : vous avez travaillé deux mois au cours de l’été 1972 pour vous faire de l’argent de poche ou payer vos études. Payé au SMIC 173,33 heures par mois, vous avez donc travaillé 346,66 heures au total. Votre travail n’a duré que deux mois, mais pour votre retraite vous avez acquis un « trimestre ».

Depuis le 1ier janvier 2014, un trimestre équivaut à percevoir un salaire brut de 150 fois le SMIC horaire (au premier janvier 2024 : 150 X 11,65 € = 1747,50 €). Evidemment vous ne pouvez pas cumuler plus de 4 trimestres en une année calendaire, quand bien même vous avez gagné 1607 fois le SMIC horaire dans l’année (exemple de 1607 heures pour un contrat d’horaires annualisés).


3. Une retraite, deux pensions différentes : CNAV et AGIRC-ARCCO


Vous partirez un jour à la retraite, mais vous bénéficierez à partir de ce jour-là non pas d’une pension de retraite mais de deux pensions différentes : celle versée par la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV) de la sécurité sociale et celle versée par les caisses complémentaires de l’AGIRC-ARRCO. Ces deux versements font l’objet de cotisations différentes et sont calculés de manière différente.

La CNAV perçoit vos cotisations et celles de votre employeur sur la base de votre salaire brut plafonné à 3666 € (43 992 € par an) en 2023 (tranche A des salaires). Ce plafond était de 3428 € par mois en 2020, 2021 er 2022.

Pour ceux dont le salaire est inférieur ou égal à 3666 € en 2023 la cotisation salariale est de 6,9 %, la cotisation patronale de 8,55 % sur la partie de votre salaire brut à plein temps entre 1709,28 € (SMIC 2023) à 3666 €. Au-delà de ce montant ces cotisations-là ne sont pas perçues. Sur votre bulletin de paye ces cotisations sont indiquées sur la ligne « sécurité sociale plafonnée ». La CNAV perçoit aussi une cotisation sur l’ensemble du total brut intitulée sur votre bulletin de paye « sécurité sociale déplafonnée » d’un montant de 0,4 % pour vous, salarié et de 1,9 % pour votre employeur. Ces cotisations-là ne sont pas créatrices de droit pour le retraité mais alimentent la CNAV.

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L’AGIRC-ARRCO perçoit 4,1 % de cotisation salariale et 6,01 % de cotisation patronale jusqu’à 3666 €. Elle perçoit ensuite, sur le salaire brut au-delà de 3666 € mensuels, 9,72 % de cotisation salariale et 14,56 % de cotisation patronale.

La CNAV perçoit donc des cotisations créatrices de droit sur le salaire brut inférieur ou égal à 3666 €.

L’AGIRC-ARRCO perçoit donc des cotisations créatrices de droit sur le salaire brut plafonné à 8 fois le plafond de la tranche A du salaire brut (soit 29 328 € brut en 2023).


4. Spécificités de la retraite de la sécurité sociale versée par la CNAV


La CNAV, au moment de calculer la pension qu’elle va vous verser, transforme vos revenus annuels (sous le plafond de la tranche A des salaires de chaque année de travail) passés en euros augmentés de l’inflation.

Par exemple, vos revenus en francs de l’année 1980 (sous le plafond annuel 1980 qui était de 60 120 francs) sont d’abord transformés en euros puis augmentés de l’inflation (calculée par INSEE) entre 1980 et l’année précédant votre départ à la retraite. Une fois ce calcul réalisé, la CNAV retient les 25 meilleures années sans jamais dépasser le plafond annuel de la tranche A des salaires (en 2023, 3666 € X 12), en calcule la moyenne et obtient un pourcentage du plafond de l’année de votre départ.

Par exemple, si vous avez une moyenne de 70 % du plafond sur ces 25 meilleures années, vous percevrez 35 % du plafond de l’année de votre départ à la retraite. Si vous avez perçu le plafond mensuel pendant ces 25 années vous percevrez 50 % du plafond de l’année de votre départ à la retraite. Si vous avez perçu, par exemple, le double ou plus du plafond mensuel de la tranche A des salaires, vous ne percevrez néanmoins pas plus que 50 % du plafond de l’année de votre départ à la retraite. Soit 1833 € brut par mois en 2023. La pension versée par la CNAV écrase ainsi les différences entre les bas salaires et les gros salaires. Charges sociales sur la pension CNAV : 9,1 %. En fonction de votre Revenu Fiscal de Référence, ces charges sociales peuvent être diminuées.


5. Spécificités de la retraite complémentaire versée par l'AGIRC ARRCO


L’AGIRC-ARRCO transforme chaque année le montant de vos cotisations en points de retraite complémentaire à partir d’un prix d’acquisition qui évolue avec le temps. Ce prix d’acquisition était en 2022 de 17,4316 € par point annuel. Ce point est transformé en retraite annuelle à la valeur de 1,3498 € depuis le 1ier octobre 2022.

Exemple : vous avez acquis 100 points en 2022, soit une cotisation totale annuelle de 1743,16 €. Si vous partez à la retraite en 2023, ces 100 points donneront une pension de retraite complémentaire annuelle brut de 134,98 €.

Autre exemple, vous avez acquis 3000 points sur toute votre carrière, votre pension complémentaire annuelle sera en 2023 de 4049,40 €, soit 337,45 € brut par mois. La pension versée par l’AGIRC-ARRCO « restitue » les différences de salaire entre une et 8 fois le SMIC, contrairement à la pension plafonnée versée par la CNAV. Charges sociales sur la pension AGIRC-ARRCO : 10,1 %. En fonction de votre Revenu Fiscal de Référence, ces charges sociales peuvent être diminuées.

La pension versée par l’AGIRC-ARRCO « restitue » les différences de salaire entre une et 8 fois le SMIC, contrairement à la pension plafonnée versée par la CNAV. Charges sociales sur la pension AGIRC-ARRCO : 10,1 %. En fonction de votre Revenu Fiscal de Référence, ces charges sociales peuvent être diminuées.


6. Avantages et inconvénients principaux de la retraite française du secteur privé


Principaux avantages de la retraite française du privé :

  • Le temps de travail est compté en trimestres. En Allemagne c’est en mois, en Italie c’est en semaines.

  • Un trimestre peut être acquis par le salaire perçu à temps plein en seulement un mois (si votre salaire brut équivaut à, au moins, 1,5 fois le SMIC).

  • Certaines situations permettent d’acquérir des trimestres bien qu’ils n’aient pas été travaillés : congé parental, arrêt maladie, chômage indemnisé, situation de handicap, service militaire, entre autres.

  •  Parmi ces périodes non travaillées certaines sont considérées comme « cotisées ». Dans toute votre carrière on considérera comme « cotisés » : 4 trimestres de chômage indemnisé, 4 trimestres d’arrêt maladie, 4 trimestres de service militaire, 4 trimestres d’incapacité de reprendre le travail ou d’incapacité temporaire de travail.

  • Vous êtes né entre le 1ier janvier et le 30 septembre, si vous avez acquis 5 trimestres avant le 31 décembre de l’année de vos vingt ans, vous êtes apte à un départ anticipé pour carrière longue. Condition pour partir entre 60 et 62 ans : avoir acquis tous les trimestres « cotisés » demandés en fonction de votre année de naissance.

  • Vous êtes né entre le 1ier octobre et le 31 décembre, si vous avez acquis 4 trimestres avant le 31 décembre de l’année de vos vingt ans, vous êtes apte à un départ anticipé pour carrière longue. Condition pour partir entre 60 et 62 ans : avoir acquis tous les trimestres « cotisés » demandés en fonction de votre année de naissance.

  • Les mères obtiennent 4 trimestres pour avoir mis au monde un enfant (ou réalisé une adoption) et 4 trimestres pour avoir élevé l’enfant jusqu’à 4 ans (à raison d’un trimestre par an pendant 4 ans), soit 8 trimestres au total. Depuis 2010, les 4 trimestres d’éducation peuvent être partagés entre la mère et le père par une décision commune validée avant les 4 ans de l’enfant. C’est la mère qui décide de ce partage éventuel, si elle ne le souhaite pas, c’est elle seule qui en bénéficie.


Principaux inconvénients de la retraite française du privé :

  • Pour un départ anticipé en carrière longue entre 60 et 62 ans les trimestres nécessaires en fonction de l’année de naissance doivent tous être cotisés. Or, les 4 trimestres accordés aux mères pour avoir mis au monde ou adopté un enfant ne sont pas considérés comme cotisés, sauf 1 trimestre depuis 2014 pour les enfants nés à partir de cette année-là. Les effets de ce trimestre cotisé acquit ne seront observés qu’à partir de 2050 environ.

  • Les femmes nées dans les années 60 et 70 ont souvent travaillé avant le 31 décembre de l’année de leurs 20 ans et pourraient être apte à un départ en carrière longue. Ces femmes ont eu ensuite, pour la plupart, une double journée de travail : leur emploi puis tâches ménagères et éducation des enfants. Elles ont pourtant souvent l’impossibilité de bénéficier d’un départ anticipé à la retraite pour carrière longue à cause d’un manque de trimestres dits « cotisés ».

  • Les carrières des femmes sont, beaucoup plus souvent que les hommes, hachées par des périodes de plus faibles cotisations. Le montant de leurs pensions de retraite en subit les conséquences.

  • Le début de carrière des jeunes a été de 1980 à 2022, composé à 80 % de contrats de travail autres qu’en CDI : stages, alternance, CDD, intérim, etc. La retraite complémentaire est, en conséquence, beaucoup moins productive de points dans ces débuts de carrières chaotiques. Si le projet initial du mandat présidentiel (une retraite uniquement par points) avait été voté, cela aurait fortement pénalisé cette catégorie de salariés et favorisé les très hauts salaires.
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7. Synthèse


Le système de base de la retraite française du secteur privé est composé de la retraite de la sécurité sociale versée par la CNAV et de celle de la retraite complémentaire versée par l’AGIRC-ARRCO. Ces deux pensions de retraite s’additionnent pour composer le revenu des retraités français du secteur privé. Leur mode de cotisation et de calcul de leur montant sont différents.