Quels sont les risques pour l'employeur et que peuvent faire les salariés en cas d'absence de CSE ?

Votre employeur tarde à organiser les élections professionnelles pour élire les membres du CSE ? Vous pensez que des pressions sont exercées pour dissuader les candidatures aux élections, causant ainsi une absence de CSE ? Nous vous exposons en détail les risques pour l’entreprise et comment agir. 

Rappel : quand doit-on obligatoirement créer un CSE ?


L'obligation de mettre en place un CSE
 

Depuis le 1er janvier 2020, l’ensemble des mandats qui étaient en cours dans les anciennes instances représentatives du personnel (comité d'entreprise, délégués du personnel et comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) ont dû prendre fin. Ces instances ont été remplacées par une instance unique : le Comité économique et social (CSE).

Désormais, d'après l’article L2311-2 du Code du travail, la mise en place d'un (CSE) est obligatoire dès lors qu’une entreprise emploie 11 salariés pendant 12 mois consécutifs. Cette obligation concerne :

  • Les employeurs de droit privé ;
  • Les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) ;
  • Les établissements publics à caractère administratif (EPA) lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé.


Le calcul de l’effectif d’une entreprise

Pour calculer l’effectif d’une entreprise, il faut prendre en compte (article L1111-2 du Code du travail) :

  • Les CDI à temps plein et les travailleurs à domicile ;
  • Les CDD, les intérimaires, les intermittents et les salariés des entreprises extérieures présents dans les locaux depuis au moins un an. Vous devez les comptabiliser au prorata de leur temps de présence (en-dehors du cas où ils remplacent un salarié absent ou si le contrat est suspendu) ;
  • Les temps partiels : ils sont décomptés sur une base “équivalent temps plein” (ETP).

Bon à savoir : les personnes en contrat d’apprentissage ou les contrats aidés ne sont pas comptabilisées (article L1111-3 du Code du travail).




Absence de CSE : quelles sanctions pour l’entreprise ?

En cas de non-respect du droit du travail, l’entreprise s’expose à plusieurs sanctions.

Le délit d’entrave au CSE

Le défaut d’organisation des élections professionnelles et de rédaction d’un procès-verbal de carence peut être qualifié juridiquement de délit d'entrave au CSE. Les peines encourues sont un an d’emprisonnement et 7 500 € pour le chef d’entreprise personne physique (article L2317-1 du Code du travail) et de 37 500 € pour une société (article 131-38 du Code pénal).

 

Le versement de dommages et intérêts

En plus des peines précédemment énoncées, tout salarié peut demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de l'absence de représentation du personnel. La jurisprudence de la Cour de cassation est constante en la matière (on peut citer notamment l’arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 mai 2011, n° 10-12.852). L’absence d’organisation d’élections par l’employeur constitue systématiquement une faute, causant un préjudice aux salariés. Les intérêts de ces derniers ne pouvant pas être représentés et défendus, cela leur donne donc droit à des indemnités.

Une organisation syndicale peut aussi demander un dédommagement à ce titre (Cour de cassation, chambre sociale, 7 mai 2002, n° 00-60.282).

 

Bon à savoir : en cas de carence du CSE, c’est-à-dire que des élections professionnelles sont organisées mais qu’aucun candidat ne se présente, comme le prouve un procès-verbal de carence, l'entreprise n'encourt aucune sanction. Si les élections du CSE sont annulées suite à une contestation de leur régularité, il n’y a pas de risque pour l’employeur dès lors qu’il organise de nouvelles élections rapidement, dans un délai souvent défini par un juge.

 

Absence de CSE : quelles conséquences au sein de l’entreprise ?  


Ne pas avoir de CSE alors que l’effectif est de 11 salariés ou plus engendre d’autres répercussions sur l’entreprise que les sanctions prévues par le Code du travail. À défaut de CSE, l'employeur ne pourra pas procéder aux consultations obligatoires du CSE, entravant ainsi l’avancement de nombreux sujets et projets.

Voici les principales conséquences de l’absence de CSE, conformément à la jurisprudence :

 

Le licenciement pour inaptitude professionnelle ou non

L’avis d’inaptitude est prononcé par la médecine du Travail lorsque l’état de santé du salarié est incompatible avec le poste de travail. En cas de licenciement pour inaptitude, qu'elle soit d'origine professionnelle ou non, l'employeur a l'obligation de consulter le CSE sur le reclassement et la proposition de postes adaptés au salarié (articles L1226-2, L1226-10 du Code du travail). Même lorsque l'employeur se trouve dans l'incapacité d'offrir une proposition de reclassement au salarié, la consultation du CSE est obligatoire.

L'employeur se doit de partager avec les membres du CSE les informations pertinentes concernant l'état de santé du salarié et les efforts de reclassement. Cette consultation doit se dérouler avant que l'offre de reclassement ne soit soumise au salarié concerné.

Sans cette consultation, le licenciement pour inaptitude pourrait être jugé sans cause réelle et sérieuse et être annulé. Ce qui peut donner droit à des dommages et intérêts pour le salarié. Un délit d’entrave peut également être constitué.

 

Bon à savoir : la Cour de cassation a néanmoins précisé qu’il existe une exception à l’obligation de consultation du CSE. Tel est le cas lorsque l’employeur dispose d’une dispense d’obligation de reclassement indiquée dans l’avis d’inaptitude délivré par le médecin du travail, précisant que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (arrêt du 8 juin 2022, chambre sociale de la Cour de cassation, pourvoi n° 20-22.500 et arrêt du 16 novembre 2022, chambre sociale de la Cour de cassation, pourvoi n° 21-17.255).


SolutionsCSE - Mag'CSE - Absence de CSE


Le
licenciement d’un salarié protégé

Dans le cas du licenciement d'un salarié protégé, l'employeur est dans l'obligation de consulter le CSE. Si le CSE n'est pas consulté, le licenciement est automatiquement considéré comme nul (arrêt du CE, 29 octobre 1997, n° 154.967).

 

Le licenciement collectif pour motif économique

L'employeur doit informer et consulter le CSE conformément aux articles L1233-8 et suivants du Code du travail pour tout projet de licenciement économique. Les modalités de cette consultation varient en fonction du nombre de licenciements prévus et du nombre de salariés de l'entreprise.

À défaut de consultation, la procédure de licenciement pour raison économique sera jugée irrégulière (article L1235-15 du Code du travail). Cette irrégularité peut avoir plusieurs conséquences, notamment une indemnisation du salarié du fait du préjudice subi et la qualification d'un délit d'entrave, etc.

 

Le règlement intérieur 

En l’absence de CSE, l’instauration ou la modification d'un règlement intérieur sera impossible. En effet, pour cela, l’avis préalable du CSE est requis (article L1321-4 du Code du travail). À défaut de CSE, une sanction prononcée contre un employé prise dans le cadre du règlement intérieur ne sera pas opposable à ce dernier et sera annulée.

 

L’usage en entreprise

Pour qu’un usage puisse être dénoncé par l’employeur au sein d’une entreprise, les représentants du personnel doivent d'abord en être informés et rendre un avis. Dans le cas contraire, même si l’information a été faite individuellement auprès des salariés, l’usage sera considéré comme irrégulier. Il sera inopposable aux salariés qui continueront donc à en bénéficier.

Bon à savoir : L'usage en entreprise est un avantage octroyé volontairement et de façon récurrente par un employeur à ses employés (par exemple, une prime spécifique ou des congés supplémentaires), indépendamment de toute obligation légale, stipulation d'une convention collective ou du contrat de travail.

 

La prime d’intéressement

L'implémentation d'un dispositif d'intéressement au sein de l'entreprise est réservée à celles respectant les obligations qui incombent à l'employeur en termes de représentation du personnel (article L3312-2 du Code du travail). L'absence de CSE empêche l'entreprise de conclure un accord d'intéressement avec les représentants d’organisations syndicales dans l'entreprise ou au sein du CSE.

A noter, que depuis le 18 août 2022 dans les entreprises de moins de 50 salariés, les employeurs peuvent mettre en place, par décision unilatérale, un régime d’intéressement à condition de :

  • Ne pas être couvertes par un accord de branche agréé
  • Ne pas être pourvues de CSE, ou de délégués syndicaux
  • Ne pas avoir réussi à conclure un accord d’intéressement après négociations avec le CSE ou délégués syndicaux.




Quel recours en cas d’absence de CSE ?


Si vous souhaitez vous présenter en tant qu’élu de CSE et/ou que vous êtes victime ou témoin d'une entrave à la mise en place du CSE, vous pouvez prendre contact avec l'inspecteur du travail. Il constatera le manquement et rédigera un procès-verbal d’infraction. Ce procès-verbal sera transmis au Procureur de la République qui prendra le relais en initiant les procédures nécessaires, afin que des mesures soient prises pour faire cesser l'infraction.

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À retenir

La création d’un CSE est obligatoire pour toute entreprise employant 11 salariés pendant 12 mois consécutifs.

Sa mise en place est d’une importance primordiale pour représenter et défendre les intérêts des salariés au sein d’une entreprise.

Les entraves volontaires ou la négligence de la part de l’employeur à l'organisation des élections du CSE sont ainsi lourdement sanctionnées, que ce soit par le Code du travail ou d’un point de vue plus pratique.

Un salarié qui constaterait ce type de manquement au sein de son entreprise est en droit de saisir l’inspection du travail, pour obliger l’employeur à se mettre en conformité.

 

 
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